septembre 2000 - juin 2004

Début du voyage

Début de rédaction le 25 Septembre 2000.

Samedi soir. Ma journée de travail finit juste. Pour la dernière fois, j'ai traversé la passerelle au dessus du chemin de fer pour remonter la rue vers Victoria Terminal. Il n'est pas encore bien tard, mais ayant mis en ordre toutes mes affaires, je n'avais plus de raison de rester au bureau. Je profite donc de ce petit restaurant découvert trop tard, de sa salle et de son ambiance si différentes de celle des autres. Arrivé à la gare, j'attends sur le quai juste en face d'un panneau d'affichage qui me semble clignoter au delà de ce qu'une conception bâclée devrait permettre. Comme je m'assois devant au milieu des autres passagers en attendant que soit affichée la voie où arrivera mon train, l'écran noir jusqu'alors occupé uniquement par les références des trains se métamorphose en télévision et commence la diffusion d'une publicité pour Pepsodent. Le miracle se répète environ toutes les dix minutes, toujours avec les mêmes annonces, et si je m'explique mieux son clignotement, la présence, au milieu de cette foule dont pas un membre n'aurait avec son salaire annuel suffisamment d'argent pour acheter un téléviseur, de cet écran ne cesse de m'interroger.

Le numéro du quai est enfin affiché. Il fait encore noir lorsque je monte dans mon wagon, et je m'installe quasiment en habitué pour mon second voyage sur cette ligne en direction d'Aurangabad. Au matin à la gare je tergiverse comme d'habitude un peu avant de choisir un rickshaw pour me conduire jusqu'au terminal des bus. Pas question aujourd'hui de suivre un tour organisé, quitte à perdre des informations je veux faire ce voyage à mon rythme, sans guide. Je m'installe à l'arrière avec les deux sacs qui me suivront pour le reste du voyage, et nous sommes partis. Il y avait quelques autres touristes à la descente du train, que j'ai laissé partir devant. Au terminal, uniquement des Indiens lorsque j'arrive mais là aussi certains de ceux que je dois bien considérer comme mes compagnons sur la route, parce cette Inde nous aimerions tous être les premiers à la découvrir et qu'en même temps les amitiés éphémères et les infrastructures qu'amène ici ce tourisme ne sont pas à rejeter, arrivent comme l'heure avance, en même temps que se lève le jour. Plutôt que d'attendre le bus pour les touristes, je prends le premier en direction d'Ajanta. Avec moi deux femmes, mère et fille, représentent l'occident. Nous nous installons tous sur les banquettes en bois, et fort de mon entraînement au sommeil (surtout grâce au peu d'heures que je lui consacre, il se fait rapidement sentir) je m'endors bientôt.

Évidemment ce temps de sommeil, c'est autant de paysage perdu, et lorsque comme à chaque je m'éveille pour enfin descendre sur le site bouddhique, j'ai le plaisir de découvrir après la sécheresse d'Aurangabad et le quasi-désert que j'avais connu à Ellora une vallée verte encaissée entre deux modestes montagnes. Comme partout cependant la poussière et la vétusté de la route et des échoppes qui attendent les touristes rappellent que je suis toujours en Inde. Relativment en avance, ayant toute la journée pour découvrir le site avant de me rendre à Jalgaon pour reprendre le train, je laisse mon sac à la consigne judicieusement placée à l'entrée du suite (qui conformément à ce qu'en disent les guides demandent à ce que le sac soit fermé - je sors enfin mon cadenas d'une poche dudit sac) et profitant de la fraîcheur encore présente je suis un guide local qui m'amène pour faire le tour de la vallée. Lorsqu'il apprend que je suis Français, il commence à me parler dans ma langue mais je lui demande de repasser à l'Anglais. Charmant réflexes qu'aura acquis toute personne appelée à fréquenter les hordes de voyageurs français qui chaque année fréquentent les sites les plus touristiques du pays une fois réalisé le triste niveau de la plupart de mes concitoyens dans la Lingua Franca employée par le reste du monde. Non que ce soit de ma part une façon de me différencier (quoique ce point soit certainement discutable) mais j'estimai à ce moment avoir suffisamment eu à modifier mon Anglais afin de le conformer à la prononciation si spéciale des Indiens pour épargner ce traitement à mon idiome natal, qui de plus restait moins maîtrisé que l'Anglais par mes interlocuteurs.

Une fois franchie la rivière et gravies les premières pentes, la vue sur la vallée ne présente plus que verdures et roches, oubliant tout rappel de notre XXè siècle (à moins qu'il ne s'agisse de ceux du début du XXIè, je laisse aux spécialistes le soin de débattre sur la question). Le chemin semble peu fréquenté, et pourtant il est régulièrement semé de bancs et de belvédères qui offrent des vues superbes sur la gorge. Cette dernière se termine (ou plutôt commence, étant donné le sens de la rivière) par une superbe cascade, au flux modeste mais dont j'admire le beau parcours sinueux avant la chute. D'ailleurs il nous faut de nouveau traverser pour aborder le versant opposé, et nous repassons cette fois en surplomb des grottes que j'ai plus tôt prises en photo.

Nous redescendons vers l'entrée des grottes, non sans une pose Sprite bien agréable alors que la chaleur commence à se faire sentir. La distance entre ici et Bombay commence à se faire sentir  : mon guide doit se démener pour trouver la monnaie sur le billet de cinq cents roupies avec lequel je dois payer (plus d'autre espèces). Je paie ensuite mon ticket ainsi qu'un supplément pour l'éclairage des grottes, et commence ma visite. Les peintures sont superbes et même si l'utilisation du flash est interdite leur dégradation est plus grande que ne le laissait présager les photographies que j'en avais vues. Bien que le nombre de visiteur soit réduit en cette saison, je ne peux passer autant de temps que je l'aurai souhaité devant chaque mur, poussé par le trop court quart d'heure auquel sont restreintes les visites dans les trois salles aux peintures les plus remarquables.

(à suivre)

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